Trouver son propre momentum
Un livre, un verre, la page et l'étiquette - Plaisir épicurien#6
Trilogie de momentum
Un rêve, un projet, une création dans trois univers esthétiques différents, trois temporalités concomitantes, et pour leurs auteurs le sentiment de se sentir à la place où ils devaient se trouver à un moment de leur parcours de vie.
Alors qu’en juillet 2024, Mathieu Lehanneur offrait au monde entier un rêve éveillé avec l’hypnotique vasque olympique s’élevant avec une grâce infinie au dessus des jardins des Tuileries, le Domaine de la Pierre Gravée sortait sa cuvée Inspirations, patiemment élevée 18 mois en fûts dans le silence de ses caves troglodytes de Vouvray. Depuis une semaine le domaine viticole présente son Momentum, fruit de 30 mois de minutieux élevage.
Et dès le 21 juin, la transe collective vécue autour de cet amer lumineux dans le ciel parisien va renaître quant à elle pour quelques semaines.
Dans l’intervalle, un petit bijou d’écriture poétique, libre, spirituelle, espiègle parfois, tendre toujours, s’est installé sur ma table de chevet et ne l’a plus quitté : Couver un astre de l’inclassable et talentueuse journaliste et écrivaine Sophie Fontanel. Elle excelle dans l’esprit du conte, on l’écouterait pendant des heures, réminiscence probable des origines orientales arméniennes de ses grands parents maternels.
Aucun lien ne rattachait à priori ces trois créations je vous l’accorde si ce n’est celui qui s’est imposé à moi naturellement sans que je sache ni ne cherche à en connaître l’origine. Les correspondances esthétiques tissent souvent leurs fils en secret.
Le terme momentum puise son origine dans le domaine de la physique, il a migré ensuite dans le langage financier, marketing, sportif et aujourd’hui le langage courant. Il désigne le moment de l’élan, de l’élévation, de la trajectoire ascendante, de la dynamique positive, le bon moment pour donner plus d’impulsion à son projet, son rêve, sa vision.
Un livre qui se lit comme un conte
Si vous aimez le merveilleux, l’imprévu, le récit intimiste qui rejoint l’universel, je vous invite à vous immerger sans retenue dans cet ouvrage exquis pour revivre l’émotion qui vous a certainement saisi pendant ce mois de parenthèse enchantée, attendant chaque soir que la magie se reproduise.
Sophie Fontanel est en vacances en Grèce avec des amis au moment de la cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques de Paris. Suivant de loin la retransmission sur un écran géant dans un café, elle aperçoit soudain son immeuble et comprend que le mât installé devant ses fenêtres et qu’elle trouvait insupportable d’incongruité, sert d’armature à un miracle. Rentrée chez elle quelques jours plus tard, elle va s’installer en vigie chaque soir et nous faire partager à nous ses abonnés d’Instagram, son émotion toujours subtile et délicate, souvent décalée, ainsi que les souvenirs, pensées et digressions que ce moment unique et éphémère font naître en elle. Une émotion qu’elle nous distille, dans cette douceur enveloppante autant par le verbe que par la voix. Nous étions alors nombreux dans son petit appartement sous les toits, dans cette communion de beauté.
Quelques semaines plus tard, elle publie Couver un astre, aux Editions Seghers.
“Une chose qu’on désentrave, une chose qui monte, brave et humble. De plus en plus petite à mesure qu’elle gagne le ciel. Une chose adorable et prometteuse dans ce monde dont on ne peut plus ignorer aucune horreur. Une bulle d’air. Dans un silence total. Mais quand la Boule là-haut se stabilisa, quand on comprit qu’elle était à sa hauteur maximale, alors il y eut une clameur suivie d’un tonnerre d’applaudissements, prouvant que le quartier était truffé d’âmes, dans les rues, sur les quais, aux balcons, sur les toits, partout. La Boule scintillait dans la nuit, dans cet amour…
“Maintenant la boule redescendait lentement.Elle regagna son socle au milieu du bassin, son panier magistral. Elle brillait comme une tête d’enfant endormi, plaquée contre la vitre d’un véhicule et qui ne saura jamais à quel point on l’admire. Et moi, je restais là, à la contempler.”
Mathieu Lehanneur qui invita Sophie Fontanel à venir voir la “Boule” de près, signera l’épilogue de cet ouvrage délicat, un texte pudique et touchant.
Le nom de code de ce projet technologique et artistique unique était Ariane, pour protéger la confidentialité de ce qui allait devenir le symbole universel des JO 2024. Mathieu Lehanneur ne “l’appelait pas” ou plutôt lui donnait du “elle”. Il disait à ses équipes ‘je vais la voir”.
“J’allais la voir tous les soirs, au milieu du jardin des Tuileries au crépuscule du jour. Il est pourtant arrivé pour des raisons de fatigue avancée ou de vaines tentatives d’indépendance que je décide de ne pas y aller. Pas d’envol pour moi ce soir, pour maintenir haut le désir, il faut parfois se faire oublier. Mais je recevais sur mon téléphone en temps réel les prévisions des vitesses de vent heure par heure… et je n’y résistais pas. Je me rendais à son chevet. Techniquement, ma présence était inutile. Affectivement, je ne pouvais pas être ailleurs. La force gravitationnelle de cet astre était trop forte. C’était là que je voulais être… Pendant 23 jours, j’ai su que j’étais à ma place.”
La cuvée Momentum qui l’accompagne
Lorsque je lisais Couver un astre en octobre dernier, je venais d’achever les vendanges chez mon fils Philippe au domaine de La Pierre Gravée en Touraine. Grand passionné de vins, de gastronomie et d’art de vivre, il construit patiemment depuis 6 ans sa propre vision personnelle du vin qu’il aime et qu’il aime faire partager. Mais oser se décider à concrétiser ce rêve est le résultat d’une subtile alchimie : celle où l’on s’aperçoit que l’on a accumulé suffisamment de connaissances pour pouvoir franchir le pas, où l’on se sent parfaitement clair sur le vin que l’on souhaite produire, le terroir dans lequel on veut exprimer sa propre sensibilité... C’est à Vouvray dans ces terroirs d’argile à silex à fleur de roche que le rêve s’est concrétisé. Une exigence forte pour une personnalité qui ne laisse jamais la place au hasard. Les vignes sont en bio et conversion bio, les vendanges sont manuelles en petites caisses, le pressurage est lent pour ne pas stresser le jus, fermentation en levures indigènes, le vin est élevé en fûts bourguignons, dans une belle cave troglodyte sous les vignes, en lui laissant le temps d’exprimer tout son potentiel ; 18 mois pour la cuvée Inspirations, 30 pour Momentum sorti il y a quelques jours.
Comme vous pourriez penser qu’une part de subjectivité se glisse dans mon propos, je vous laisse avec l’avis du Chef Sommelier du Mas des Eydins 2 étoiles Michelin dans le Lubéron.
Bonne lecture et bonne dégustation
Si cette lettre a retenu votre attention parce que nous partageons le même intérêt pour la lecture et la dégustation de vin, vous connaissez certainement des personnes qui possèdent la même appétence pour ces plaisirs de la vie. En leur faisant lire cette lettre et en les incitant à s’abonner, nous agrandissons ensemble le cercle des épicuriens de ces univers. Vous me permettez également de poursuivre ce travail de découverte, de recherche et de curiosité. Un grand merci par avance.
L’abus d’alcool est dangereux pour la santé. A consommer avec modération.
Le livre est un puissant antidote à l’ignorance
Bravo Anne ♡